« Je crois […] en Jésus-Christ […] ressuscité d’entre les morts ». Cette partie du Symbole des Apôtres est au cœur du temps pascal que nous revivons tous les ans, et peut-être passons nous parfois trop rapidement dessus lorsque nous récitons le Credo.
« Jésus-Christ ressuscité d’entre les morts »…Quand on y réfléchit n’est-ce pas une des choses les plus invraisemblable que l’on ait jamais entendu dire ? Un homme est mort, puis il est revenu à la vie. Peut-être n’y prête-t-on pas assez attention parce que nous ne sommes pas très familiers de la mort dans notre société actuelle. Et, bien que nous vivions, le fait même de la mort, la réalité de la mort, nous est plutôt étrangère. Lorsqu’on nous dit qu’il y a eu aujourd’hui en France tant de décès… Voyons-nous au-delà du chiffre chaque personne qui a effectué ce passage ? Comment l’ont-elles vécu ? Est-ce la même chose pour tout le monde ? Pourquoi est-ce que ça nous fait si peur ? Nous voyons bien que, devant cette fatalité de la mort à laquelle nous serons tous confrontés tôt ou tard, nous sommes totalement dépouillés.
Alors devant ce mystère de la mort, la résurrection du Christ, n’est-ce pas un concept inventé jadis pour nous rassurer, pour exorciser cette réalité, pour espérer nous donner de la force le moment venu ? Pourtant, « Si le Christ n’est pas ressuscité, alors vaine est notre foi » (1 Co 15,14). Notre foi s’appuie-t-elle sur une idée, un concept, une abstraction, une image, une allégorie ou bien sur un fait historique ?
La nouveauté de la Résurrection :
Que signifie ressusciter ? On pourrait dire « ressusciter, c’est revenir à la vie ». Il y a dans la Bible de nombreux exemples des personnes qui sont mortes puis qui sont revenues à la vie, aussi bien par l’intervention d’un prophète de l’Ancienne Alliance que par celle du Christ. Lazare est l’un d’entre eux. (Jn 11, 1-44) Pourtant peut-on dire que Lazare est ressuscité ? En tout cas, ce n’est pas ce qui est dit dans l’Écriture. Lazare a été « réveillé d’entre les morts » tandis que le Christ s’est « relevé d’entre les morts ». Dans la résurrection du Christ, il y a quelque chose de plus que dans le retour à la vie de Lazare. C’est à une nouvelle vie que le Christ ressuscite, c’est comme une nouvelle naissance, c’est une « vie sur laquelle la mort n’a plus aucun pouvoir » (Rm 6,9), alors que Lazare connaitra encore la mort après son retour à la vie. Voilà la vérité culminante de notre foi : « ressuscité d’entre les morts, le Christ ne meurt plus » (Rm 6,9).
La Résurrection, l’expérience fondamentale du chrétien :
Or ce Christ ressuscité n’est pas une invention des Apôtres après la mort de Jésus, ni un concept développé après coup pour fonder une religion nouvelle. La résurrection du Christ, c’est avant tout une expérience, une rencontre personnelle avec quelqu’un : Le Ressuscité. L’Écriture décrit de nombreux récit de ces rencontres,que ce soit avec Marie-Madeleine qui se rend au tombeau le matin (Jn 20,14), avec les disciples qui se rendent à Emmaüs (Lc 24,15) ou avec Thomas huit jours après la Résurrection (Jn 20,26). Chacun de ces récits rapportent un évènement surprenant, une rencontre inattendue avec une personne qu’ils ont connue, qu’ils ont vu mourir quelques jours plus tôt et avec laquelle ils s’entretiennent, avec laquelle ils mangent, quelqu’un qu’ils sont capables de toucher, d’entendre, de voir. C’est à travers le témoignage des Apôtre que se révèle ce mystère.
La Résurrection, l’œuvre de la Trinité :
Mais bien plus que cela, la Résurrection du Christ est une intervention directe de Dieu dans l’histoire. C’est en cela qu’elle est objet de foi. Elle s’est faite par la puissance du Père qui a ressuscité le Christ, son Fils, et a de cette façon introduit son humanité dans la Trinité. L’œuvre de l’Esprit Saint a vivifié l’humanité morte de Jésus et l’a appelé à l’état glorieux de Seigneur. C’est en cela que se réalise les promesses de l’Ancien Testament qui annonçaient le salut de l’humanité déchue par la faute originelle d’Adam. Par le Christ ressuscité, c’est une vie nouvelle qui est proposée à l’homme. C’est la preuve qu’à l’origine il est fait pour vivre de la vie éternelle, c’est-à-dire de la même vie que Jésus-Christ ressuscité. L’homme peut alors comprendre qu’il n’est nul besoin de s’inventer une condition de surhomme et de se dépasser, d’aller au-delà de sa nature pour acquérir sa véritable identité. Celle-ci lui est donnée par le Père qui veut que comme son Fils, l’homme parvienne à l’état d’homme glorieux, qu’il accueille le don de la grâce qui lui est fait pour que l’homme soit lui aussi fils comme le Fils et que lui aussi, au terme de sa vie, participe à la vie bienheureuse qui est celle de la Trinité.
La Résurrection, le projet de Dieu pour l’homme et pour chaque homme :
La résurrection est donc un évènement transcendant et qui dépasse l’histoire : les conséquences de cet évènement ont un impact sur la vie de tous les hommes, y compris nous qui vivons deux mille ans après l’évènement. Toute personne humaine est faite pour la vie éternelle, et si c’est l’Esprit-Saint qui a vivifié l’humanité morte de Jésus pour l’appeler à son état glorieux, de même, nous aussi devons désirer ardemment recevoir cet Esprit du Père et du Fils pour avoir en héritage la vie éternelle. On peut alors affirmer avec que « le but de la vie chrétienne est l’acquisition de l’Esprit-Saint ». En effet, suivant le même itinéraire spirituel que les Apôtres, nous devons avoir en vue, non pas seulement la résurrection du Seigneur mais surtout la Pentecôte comme aboutissement de notre carême. Le Christ nous a montré le sens de notre vie en ressuscitant, en tant que premier ressuscité, « prémices de ceux qui se sont endormis » (1 Co 15,20), mais c’est à nous de nous engager sur ce chemin pour suivre le Christ dans sa résurrection, à nous d’ouvrir nos cœurs pour recevoir ce don de l’Esprit-Saint qui nous fait renaître à la vie nouvelle. La vie éternelle dépend donc aussi de notre vie terrestre. C’est maintenant que je prépare la vie de l’au-delà en vivant de « l’amour de Dieu qui a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit-Saint qui nous a été donné » (Rm 5,5). La vie éternelle est donc pour nous une exigence pour la vie présente. La vie éternelle commence maintenant, quand nous participons à la vie de Dieu par l’amour et le pardon. Ainsi, le paradis est-il l’entrée complète, entière et définitive dans la plénitude d’une vie qui a déjà commencé. La vie éternelle est déjà commencée (Préface du dimanche VI).